Un cadeau de Noël: le livre de Christos Chryssopoulos, Athènes-Disjonction (traduit du grec par Anne-Laure Brisac)

Extrait :

“Il y a des renfoncements dans la ville, des lieux cachés qui font penser aux endroits sous les tapis, là où – comme le dit l’adage – les oublieux poussent les détritus, les poussières, tout ce qu’on veut cacher et dont on ne veut pas vraiment s’occuper, ou simplement ce qu’on veut oublier. Et chaque fois que se présente quelque chose d’autre à pousser sous le tapis, le coin se soulève et un nouveau débris vient s’ajouter aux précédents de manière à ce que – dans les profondeurs du temps – personne ne se souvienne de ce qui est caché là, que les choses y soient reléguées pêle-mêle et que, par conséquent, on les oublie, au sens propre, on les perde en même temps qu’elles s’entassent. Tandis que je marchais aujourd’hui dans Athènes, j’ai compris, au moment précis où je prenais cette photo, que toutes les notes que je conserve avec ces prises de vue – depuis déjà trois ans, c’est le troisième hiver – constituent mon coin de tapis personnel, au sens métaphorique. Je repousse dessous, et puis j’oublie, la question fondamentale de savoir si je veux vraiment vivre ici ou si je me laisse seulement porter par le temps qui passe.”